CoMéLI 13


Coordination des Médecins Libres et Indépendants des BdR



Nous, médecins indépendants et apolitiques engageons une action de résistance contre l'application de la Loi santé, que nous jugeons dangereuse pour nos patients et l'avenir du système de soins français.

Que disent les médecins de la Loi Santé (les véritables enjeux de la loi)

La ministre de la santé dit ne pas comprendre pourquoi les médecins s’opposent à cette loi, « source de progrès social« .

Nous allons vous aider à cerner les véritables enjeux de la loi.

1. Concernant le tiers-payant généralisé obligatoire (TPGO)

Sur le principe de faciliter l’accès aux soins des plus démunis
. ce principe est louable
. il existe cependant déjà plusieurs mécanismes permettant la gratuité des soins, notamment la CMU (Couverture Maladie Universelle), l’AME (Aide Médicale d’Etat). Certains médecins pratiquent déjà le tiers-payant sur tout ou partie du montant, d’autres acceptent volontiers de n’encaisser le chèque du patient qu’une fois celui-ci remboursé ou « en fin de mois ».

Le fait que de nombreux français, faute de moyens financiers, renoncent aux soins est un argument fallacieux qu’utilise la ministre de la santé pour justifier le TPGO.

Ce document le prouve sans le moindre doute (CNS_février 2012)

Il s’agit de la présentation faite le 7 février 2012 pour la réunion de la commission permanente de la Conférence Nationale de Santé. Intitulée « Quels indicateurs de la solidarité du système de santé? », elle reprend les travaux du Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM) sur les indicateurs de l’accessibilité financière des soins.

Il y est notamment précisé :
– page 40 : « Un renoncement assez limité : sur la période 2004-2009, le taux de renoncement à consulter un médecin dans le premier quintile de revenu a augmenté de 0,6 point en France mais il reste néanmoins bas et ne concerne toujours que moins de 5% des 20% des Français les moins riches »
– page 42 : « Les soins médicaux est le poste le moins touché par les renoncements »
– « Au vu des données macro-économiques, les ménages financent directement une part relativement restreinte de leurs dépenses de santé« ,
– « Les restes à charge les plus élevés, fortement liés à la liberté tarifaire, sont composés très largement des soins dentaires prothétiques« .

En fait, les difficultés d’accès aux soins pour raison financière concernent essentiellement les soins qui ne sont déjà pas pris en charge par l’assurance maladie : les prothèses dentaires, l’optique. Le tiers-payant généralisé obligatoire (et la loi de santé dans son ensemble) ne corrigera en rien ce problème !

Sur les conditions d’applications du tiers-payant généralisé :
1. plusieurs conditions pour le patient :
i. qu’il accepte que la caisse d’assurance maladie prélève automatiquement sur son compte le montant des franchises
ii. qu’il accepte de ne prendre que des médicaments génériques
iii. qu’il accepte que ses données de santé personnelles soient transmises automatiquement et sans anonymisation préalable de l’ordinateur du médecin à un centre hébergeur de données (nous reviendrons sur ce point ci-après)

2. plusieurs conditions pour le médecin :
i. qu’il vérifie que le patient est à jour de ses droits (le médecin devra prendre le temps de vérifier par internet)
ii. qu’il vérifie qu’il a bien été réglé par l’assurance maladie et par la mutuelle du patient
iii. qu’il réclame auprès des différents organismes le montant dû au cas où il n’aurait pas été réglé (sachant qu’il existe plusieurs centaines de mutuelles)

Cela entraîne donc une perte considérable de temps que le médecin ne pourra plus consacrer au soin mais à des tâches policières et administratives.

Dans les centres de santé, appliquant déjà le tiers payant intégral, du personnel à temps plein est dédié au recouvrement des sommes dues auprès des différents régimes d’assurance maladie et auprès des très nombreuses mutuelles. Le coût financier est important (en moyenne 3 euros par acte), participant à la fragilité financière de ces structures.

Sur ce que cache le tiers-payant généralisé de la loi de santé :

  1. une perte d’indépendance professionnelle du médecin, contraire au code de déontologie médicale. Cette perte d’indépendance apparaît dès lors que le tiers payant généralisé (pour la part sécu et la part mutuelle) devient obligatoire : le médecin devenant dépendant financièrement de la sécurité sociale et des mutuelles, il ne pourra plus pratiquer la médecine selon les données de la science mais selon ce que décide le financeur.
    Exemples : le financeur pourra estimer que vous êtes trop âgé pour bénéficier d’une prothèse de hanche, il pourra estimer que l’examen demandé par le médecin n’est pas justifié… et le médecin devra se soumettre à ces décisions s’il veut être payé
  2. L’objectif final du tiers-payant généralisé obligatoire est la prise de contrôle des médecins (comme de tous les professionnels de santé) par les financeurs que sont l’assurance maladie et les mutuelles. Les médecins seront obligés d’intégrer des réseaux de soins à des conditions qui leur seront imposées, particulièrement sur leurs honoraires avec un objectif de low-cost, ce qui ne peut être que délétère pour la qualité des soins. Le médecin deviendra un technicien du soin, qui ne pourra prendre que quelques minutes pour porter un diagnostic, prescrire des examens et un traitement. Est-ce là soigner ? Est-ce là ce qu’attendent les patients, particulièrement lorsqu’il s’agit de maladies chroniques et/ou de situations complexes ?
  3. La mise en place progressive des réseaux de soin, sous le contrôle des mutuelles, ne permettra plus au patient de choisir son médecin. Il ne sera pris en charge intégralement pas sa mutuelle que s’il choisit de consulter un des médecins ayant signé un accord avec la mutuelle

Sur ce qui a été proposé par les médecins :
pour que le patient n’ait pas à avancer les frais, il a été proposé d’étendre le principe de la « carte santé », déjà mise en place par certaines banques : le patient dispose d’une carte, équivalente à une carte bancaire, avec laquelle il règle la consultation. Le médecin est directement et intégralement payé par la banque, le patient n’est débité que lorsque sa banque a été payée par l’assurance maladie et la mutuelle.
Ce principe n’a pas été accepté par la ministre.

2. Concernant l’ouverture de l’accès aux données de santé

La ministre précise que cela permettra de « développer de nouveaux services, mais aussi faciliter la recherche et l’innovation, dans le respect de la vie privée ».

Si les données de santé collectées par les médecins peuvent être utiles en recherche, particulièrement dans le domaine de la Santé Publique, certaines précautions de base sont indispensables.
La première est le respect du secret médical. Le médecin ne peut accepter que quiconque ait accès à vos données personnelles de santé, c’est un principe fondamental du code de déontologie.
Sachez qu’il existe déjà des recueils de données utilisées pour la recherche. Par exemple, la « Banque Nationale Alzheimer » permet de récolter des informations sur les patients pris en charge pour des troubles de la mémoire. Toutes ces bases de données respectent le principe du secret médical, les données envoyées par le médecin sont anonymisées au préalable et le médecin contrôle ce qu’il envoie.
Ce ne sera pas le cas avec la loi santé :

  1. les données seront collectées sans le contrôle du médecin : elles seront extraites automatiquement du dossier médical informatique du médecin
  2. surtout, elles seront transmises à un serveur national sans anonymisation préalable, en totale opposition au principe déontologique de secret médical

La ministre précise que toutes les garanties seront données pour respecter la vie privée… alors pourquoi refuse-t-elle que les données soient anonymisées avant l’envoi, sous le contrôle du médecin ?
Une anonymisation est prévue une fois les données enregistrées sur le serveur national. Mais cette méthode n’est absolument pas fiable pour protéger de manière optimale les informations.

Peut-être direz-vous que ce n’est pas grave, qu’à l’époque de l’open data, il faut savoir partager les données pour faire avancer les choses, particulièrement la médecine… Il faut comprendre un principe simple, le modèle économique de l’open data repose sur le fait de récolter un maximum de données pour les revendre aux plus offrants. Donc, tôt ou tard, sans que vous ne le sachiez, vos données de santé personnelles se retrouveront entre les mains de votre assureur ou de votre employeur par exemple… (pour comprendre, il suffit de voir ce récent reportage du magazine « cash investigation » : Cash investigation).

Le secret médical tire sa révérence en 2015

Les données recueillies permettront également au financeur des soins (assurance maladie et, à terme, votre mutuelle) d’avoir un regard sur les prescriptions de votre médecin et d’orienter celles-ci (Art. L.161-28-1-I). Le risque est que le financeur impose au médecin ses prescriptions avec un objectif plus économique que médical. Cela ressemblera à ce qui se passe au Royaume-Uni où, parce que vous êtes « trop vieux », vous ne pouvez plus être opéré de la cataracte ou bénéficier d’une prothèse de hanche.

La Loi de Modernisation du Système de Santé qu’impose aux français Marisol Touraine n’a rien d’une avancée sociale.

En voulant détruire les principes de l’exercice médicale que sont l’indépendance professionnelle et le secret médical, cette loi ne peut être acceptée.

Si les français acceptent cette loi, l’avenir de la prise en charge de leur santé et de celle de leurs enfants est gravement menacé:

Les médecins refusent cette loi et se mobilisent en Coordinations et Collectifs partout en France pour organiser la lutte.

Charte de la Coordination des Bouches-du-Rhône


Les patients ayant pris conscience des dangers de cette loi se mobilisent également :

Collectif Patients Citoyens Contre la Loi de Santé

Pétiton : « Je dis Non au Projet de Loi Santé Touraine »


Documents ou articles à télécharger :

Loi Santé _ ce qui vous attend ! (pdf)

Grève des médecins : La désinformation en bonne santé